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Photo du rédacteurCoralie Marichez

TOMBER AMOUREUX D'UN AUTRE PAYS QUE LE SIEN

Dernière mise à jour : 16 févr.

NOUVELLE-ZÉLANDE / EPISODE N°« JE NE LES COMPTE PLUS »


Vous l’avez surement déjà expérimenté, dans votre vie de tous les jours, il y a parfois des histoires qui, sans aucun contrôle de votre part, vous prennent aux tripes. Vous êtes submergés d’émotions, subjugués par la beauté du récit ou par l’atrocité des mots, ébahis par le conteur et sa justesse, captivés par un regard, un personnage ou embaumés par des odeurs que vous percevez depuis votre canapé.

Pour ma part, en voyage, ces expériences, je les vis. Il y a parfois la rencontre d’un peuple, d’une personne, d’une culture ou d’un pays, d’autres fois, la découverte d’une activité, d’une région, ou d’un métier. Il y a des voyages qui me prennent aux tripes, me submergent d’émotions à chacune de mes découvertes, d’autres qui m’émerveillent par la générosité d’une population, me captivent par un style de vie unique ou me fascinent par des systèmes hors-normes. Il y a des pays qui m’ont enseigné que la vie, la mienne, celle en laquelle j’avais toujours cru n’était peut-être pas celle qu’il me fallait. Il y a des cultures qui ont chamboulé toutes mes idées préconçues du monde pour me permettre de faire renaître mes propres versions de l’histoire, mon histoire. Et puis il y a la Nouvelle-Zélande. Ce pays qui m’a fait vivre tout ça à la fois. Comme un coup de foudre et une histoire d’amour que l’on ne contrôle pas. Vous m’avez entendue vous dire à quel point c’était incroyable là-bas, vous avez suivi mon évolution, vous m’avez vue grandir au fil de mes articles, vous êtes restés, vous aussi, ébahis face à mes récits, mais pourtant cette fois, j’ai fait le choix de partir. Je dirais même que j’en avais besoin. Surprenant vous me direz quand on sait à quel point ce pays a volé mon cœur… Et bien, je vous dirais : pas tant que ça justement… car les histoires d’amour, parfois, c’est compliqué.

Alors, de la « lune de miel » à la déception, de l’utopie à la réalité, du deuil à l’acceptation, je vous livre un nouveau bilan, toujours sans filtres, de cette énième expérience de vie chez les kiwis.

Je vous emmène ? En route !



LE COUP DE FOUDRE.

Avant de prendre l’avion il y a maintenant presque trois ans, je ne savais même pas placer le pays sur la carte et si Cachou n’avait pas planifié son année de césure au bout du monde, je ne me serais peut-être jamais intéressée à la Nouvelle-Zélande. Et pourtant. Quelques semaines sur le sol kiwi avaient suffi à me convaincre. En pleine rupture sentimentale avec mon propre pays, j’étais tout simplement tombée amoureuse d’un autre. Toute cette première année de découvertes, c’était la lune de miel.

J’étais conquise. D’ailleurs je vous disais à l’époque que je vivais vraiment au jour le jour cette expérience de vie car au fond de moi, je n’avais aucune envie de rentrer. J’étais triste et nostalgique rien qu’à l’idée de penser à un retour en terre tricolore. Et puis pour quoi faire ?! Et comme dans tous les débuts d’une histoire d’amour, j’étais ébahie par le moindre petit détail de ce pays. Vous auriez pu me mettre tous les inconvénients de la vie chez les kiwis sous les yeux, je ne vous aurais absolument pas cru. Un coup de foudre, pour une personne ou pour un pays, cela vous dépasse. C’est parfois même plus intense que ce que vous pourriez supporter mais justement, vous en voulez encore… Je me souviens être totalement séduite par chacune de nos découvertes à tel point que nous ne voulions pas reprendre la route parfois, pour savourer un peu plus longtemps tous ces instants qui, nous en avions bien conscience, auraient une fin. Rien que de m’imaginer devoir partir m’arrachait le cœur. Et dans les voyages comme dans les histoires d’amour, l’heure du départ sonne bien souvent comme celle de la rupture…

LA/LES RUPTURE(S)

Quand il a fallu partir la première fois, ce n’était pas vraiment par choix. Mon visa expirait, ma famille et mes amis me réclamaient, mais au fond de moi, je n’étais vraiment pas prête à rentrer. (Avec du recul, je me demande souvent : l’est-on vraiment un jour ?)

A l’époque, le retour en France avait été très difficile. Je vous en parlais à travers cet article (ici) essayant tant bien que mal de mettre les mots sur ce sentiment de « ne plus se sentir chez soi » alors que l’on est chez soi justement. Quel sentiment étrange que celui de flotter entre deux mondes sans trouver comme s’ancrer à nouveau dans une culture, un pays, qui fut pourtant pendant plus de 25 ans le sien ?!

Pas étonnant donc que, trois mois plus tard, j’embarquais à nouveau pour la Nouvelle-Zélande. Oui mais voilà, j’en ai très peu parlé à l’époque car le décès de mon père sera venu chambouler le tout, mais cette deuxième expérience chez les kiwis, je l’avais vécue comme un premier mixe d’amour et de désenchantement. Était-ce l’effet « retour » qui s’appliquait lui aussi, cette fois à la NZ ou était-ce les circonstances du retour, en tant que touriste, qui m’empêchaient de retrouver mes repères ? Allez savoir pourquoi, soudainement, je ne trouvais plus aucune excuse à toutes ces petites choses qui m’agaçaient. Pire, je ne voyais que ça… Finie la lune de miel… entre la NZ et moi-même, le statut était passé de « en couple » à « c’est compliqué ».

Et puis, il y a eu le décès de mon papa, la nouvelle rupture avec la NZ, le retour express en France, l’expatriation en Norvège, la rupture avec Ben, au milieu de ce fourre-tout émotionnel, je n’ai jamais vraiment eu le temps de comprendre pourquoi cette deuxième expérience néo-zélandaise n’avait pas eu le même enchantement que la première et ce départ un peu brutal m'avait laissé avec un goût d’inachevé. Alors, même si la Norvège m'aura permis de réaliser qu’il me fallait faire le deuil de cette année Kiwi pour pouvoir enfin avancer, je m’étais promise, au fond de moi, d’y retourner un jour pour finir ce que je n’avais pas eu le temps de terminer.

La suite vous la connaissez. 2020, ma formation en Patagonie, le COVID, mon arrivée de justesse en Nouvelle-Zélande et j’étais repartie pour une aventure complètement impromptue de 4 mois chez les Kiwi.




UNE HISTOIRE D’EX

Ce troisième voyage en Nouvelle-Zélande aura donc vraiment sonné comme un retour dans le passé. Je me souviens encore de ce sentiment en mars dernier d’être une étrangère en terre pourtant connue. Je retrouvais peu à peu tous ces sentiments d’émerveillement face à la culture kiwi sans jamais pour autant trouver ma place, mes repères. C’était comme chacun de mes retours en France. J’étais tellement heureuse de retrouver mes amis, ma kiwi family, mais j’étais incapable de me projeter dans quelque projet que ce soit sur le sol néo-zélandais.

Alors bien sûr il y a le contexte du COVID-19 qui n’a pas aidé. Entre stress d’être à l’autre bout du monde et incertitude pour l’avenir, j’ai, comme tout le monde, eu beaucoup de mal à avancer dans mes projets.

Mais c’est ce sentiment de revenir vivre dans mon passé qui était déstabilisant, surtout dans un contexte de visa de touriste. En effet, ce statut est selon moi très exclusif. Si j’insiste souvent sur le fait que je vis à l’étranger et que je n’y voyage pas, c’est exactement pour faire cette différence entre touriste et expatrié. L’intégration, aussi difficile soit-elle, a lieu plus facilement quand vous faites partie intégrante d’un pays et d’une culture, en d’autres mots, que vous y travailliez avec les locaux.

Le travail justement, c’était le deuxième problème lié à ce visa. Je n’avais pas la possibilité légale de travailler et donc la liberté financière nécessaire pour m’aventurer dans des projets quels qu’ils soient. Il y avait bien un peu de boulot dans la cueillette de fruits, au black, mais sincèrement, à 29 ans, j’en ai marre parfois de ne pas pouvoir me lancer des boulots un peu plus intéressants. D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez déjà perçu votre travail comme une chance, mais je vous assure que depuis cet épisode néo-zélandais, l’accès au travail pour moi ne sera plus jamais perçu comme une contrainte mais bel et bien comme une liberté...

Et puis, finalement, avec ce statut de touriste et ce contexte du virus, je me suis prise en pleine face ce sentiment d’être citoyenne de nulle part…Imaginez-vous, vivant à l’étranger depuis plusieurs années, devoir « rentrer » en urgence « chez vous » et vous poser la question sincère du « c’est où chez moi ». La France, cela fait trois ans que je l’ai quittée. Et bien que je me réconcilie peu à peu avec mon pays, ce n’est toujours pas pour moi l’endroit sur cette planète où je me sens le mieux. Cette crise sanitaire, c’était donc le début d’une nouvelle crise identitaire. Une de plus vous me direz. Sauf que celle-ci touche à des questions plus profondes de société, d’immigration, d’émigration… Et encore, je suis très chanceuse de « fuir » un pays qui n’est pas en guerre, et d’avoir choisi de partir… Où aller quand le seul endroit où vous êtes le bienvenu est en fait le dernier endroit où vous avez envie d’être et que le reste du monde a fermé ses frontières ? ...

Enfin, si je tire la métaphore de l’histoire d’amour jusqu’au bout, revenir en Nouvelle-Zélande c’était comme retourner vivre chez son ex (oui, je sais j’ai fait les deux, mais ça c’est une autre histoire) : vous avez un passé à deux, vous vous êtes séparés, vous vous retrouvez, vous vous connaissez par cœur mais pourtant vous avez tous les deux changés alors c’est bien souvent difficile de reconstruire de nouveaux repères.

Chez Terri par exemple et avec toute ma kiwi family, j’ai vraiment galéré à retrouver ma place au sein de la communauté. J’ai eu très peur de ne plus être acceptée pour celle que je suis aujourd’hui, car celle à qui ils ont dit au revoir il y a un an et demi n’existe plus. Toutes les expériences vécues depuis m’ont profondément changée et si je suis souvent convaincue que c’est pour le meilleur, quand je fais face à des situations/personnes du passé, les doutes reviennent à moi. Et ça, c’est ce qu’on appelle le manque de confiance en soi. Cela ne m’arrive plus aussi souvent qu’avant, mais c’est très fréquent pour moi de perdre toute confiance en moi quand il s’agit de mes histoires d’amour, quelles qu’elles soient…


JE T’AIME MOI NON PLUS

Alors, des raisons de détester la Nouvelle-Zélande au fil de mes expériences j’ai essayé d’en lister quelques-unes. J’ai longtemps détesté ce pays pour être aussi beau mais aussi loin de la France, pour le fait qu’il ait une population aussi attachante et généreuse, pour m’avoir volé mes projets de voyages en me donnant tout simplement l’envie de rester, pour ne pas donner d’accès plus simplifié aux visas de travail, pour ne pas avoir aidé plus que cela les gens comme moi « bloqués » durant la pandémie. Je l’ai détesté de ne pas avoir cette culture de la sociabilité à la française et de ne pas avoir cette amour du temps passé à table. J’y ai parfois détesté la culture de l’alcool et des drogues. Et puis je l’ai détesté de ne pas me donner le même type d’amitié qu’avec mes amis français.

Je l’ai trop souvent comparé, je l’ai adoré, je l’ai haï, mais au final, comme une enfant gâtée, je l’ai détesté ce pays tout simplement parce que je l’aimais trop et que j’avais l’envie presque naturelle de le rendre parfait…

Mais voilà, aujourd’hui, après ce troisième chapitre néo-zélandais, je crois cette fois que j’ai compris. Je l'aime vraiment ce pays. Et y revenir, une dernière fois, c'était l’accepter. Avec ses défauts mais surtout ses qualités. Que ce soit la diversité de ces paysages ; sa taille qui vous permet de passer, parfois en moins de 3 heures, des montagnes à la mer ; son nombre d’habitants, restreints, qui m'évite des crises de panique dans la foule ; ce mode de vie à la kiwi, très cool et détendu qui fait de moi la Coralie la moins stressée et plus heureuse que j’aie jamais connu ; ce vent de liberté qui souffle à tous les coins de rue et qui me donne des ailes, personne ne vous juge de rien, vous faites ce que vous voulez de votre corps, de votre argent, de votre temps ; sa simplicité de vie, l’administratif se gère en un coup de téléphone avec une grande patience et de la sympathie de la part de tous ; et puis, dernier point mais pas des moindres, ses habitants, qui sont pour moi, les personnes les plus généreuses et avec le cœur sur la main que j’aie jamais rencontrées.

Alors oui, cette fois, je suis partie de mon plein gré. J’ai quitté la Nouvelle-Zélande, mis fin à ce périple improvisé, non pas parce que je ne l’aime plus, mais tout simplement parce que je n’ai pas de futur possible là, à l’instant T, dans ce pays. Cette expérience de 4 mois m’aura fait comprendre à quel point ces visas de travail sont précieux... Et j'en ai marre de ne pas pouvoir me poser pour du long terme dans un pays autre que le mien. Alors, avant qu'il ne soit trop tard, je vais leur donner une chance aux Caribous et allez voir comment la vie se passe de l'autre côté de l'atlantique. Qui sait, je vivrais peut-être un autre coup de foudre pour un pays...


Et puis, pour être honnête, mon histoire d'amour avec la NZ ne s'arrêtera pas là... sans ces trois aventures en NZ, je n'aurais jamais atteint le degré de confiance qui m'a amenée à me mettre à nue sur ce blog ou devant l'objectif... Ma vie de kiwi m'a apporté ce vent de liberté qui m'habite aujourd'hui au quotidien. Et je ne serai jamais devenue qui je suis aujourd'hui sans ces trois passages chez les kiwis ! Alors oui, c'est le cœur tout de même en peine que j'ai dû à nouveau dire aurevoir à ce pays mais quelque chose me dit que ce voyage au bout du monde ne sera pas le dernier. Car au fond de moi, la Nouvelle-Zélande c'est maintenant un peu comme une deuxième maison...


Love. Co.

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