Aujourd’hui, cela fait trois ans que j’ai perdu mon père. 3 ans que je navigue des océans de rires, de doutes, de pleures, et de colères. 3 années à tenter de comprendre la fille que j’étais, 3 années à tenter de comprendre la fille que je suis devenue.
Quand j’étais petite, je me sentais souvent incomprise. J’avais l’impression que le monde tournait à l’envers. Que les gens ne voyaient pas ce que je voyais. Qu’ils ne ressentaient pas ce que je ressentais. Je me suis souvent sentie jugée d’être qui j’étais. Trop exigeante. Trop perfectionniste. Trop sensible. Trop susceptible. Puis j’ai grandi et j’ai appris. J’ai fini par entrer dans le moule moi aussi.
A 18 ans, j’ai écrit une lettre à mes parents intitulée « notice d’utilisation de votre fille » (ou quelque chose comme ça). Une lettre dont j’avais complètement oublié l’existence, jusqu’au soir des 50 ans de mon père, 2 ans plus tard. Alors que je discutais de manière bon enfant avec mon mec dehors, ce dernier me lançait un « non mais t’es vraiment pas facile à vivre tu sais ? » auquel mon père rétorquait « Si tu avais pris le temps de lire et d’écouter la notice, tu saurais ». Je me souviens encore de mon regard ébahi face à sa réponse et de la fierté qu’il avait dans les yeux alors qu’il narguait mon mec de plaisir, parce que mon père, lui, il savait.
Quand il est décédé il y a trois ans, j’ai eu l’impression qu’il avait emporté cette notice d’instructions avec lui. Comme s’il l’avait modifiée et complétée depuis, sans jamais me la repartager. Comme si pendant tout ce temps, il avait mieux compris que moi qui j’étais.
Et puis, l’année dernière j’ai découvert mon trait de « Personne à Sensibilité Elevée » ou « d’hypersensible ». Soudainement, c’était comme si tous les articles, livres et podcasts parcourus venaient tout droit de mon cerveau que l’on avait fraîchement décortiqué à la petite cuillère. La claque.
Et même s’il n’avait aucune idée de ce concept, je suis persuadée qu’au fond, mon père, il savait.. Il savait bien comment gérer l’espace et le silence dont j’ai besoin quand je suis en colère. Il savait bien qu’il me faut me distraire de mes émotions quand celles-ci ont pris le contrôle ou ma vie devient l’objet d’un drame cinématographique en l’espace d’une seconde. Il savait bien qu’aucun mot ne me calme quand je suis en crise et que seules ces blagues pourries viendraient transformer ma frustration en éclat de rire. Il savait bien que j’avais une sensibilité plus accrue au monde et qu’il fallait juste que j’apprenne à la gérer. Il savait bien, parce que lui, la notice il l’avait…
Alors Papa, 3 ans après ton départ, aujourd’hui je m’y remets. Cette notice je l’ai bien trop longtemps délaissée. C’est à travers mes écrits que tu m’avais comprise. C’est à travers mes écrits que peut-être je me comprendrais. Ce blog il est encore loin d'être parfait. Mais si je le fais pas aujourd'hui pour toi, je ne le lancerai jamais. Alors, cette fois, ça y est, le bouton est poussée, le blog est lancé, bienvenu dans cette nouvelle page-emotion.
PS : Tu nous manques.
Love.
Co.
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